Magistrats, juges consulaires et autre personnel appelés à servir au tribunal de commerce de Cotonou et à la Cour d’appel de commerce de Porto-Novo ont entamé, ce lundi 19 juin à Porto-Novo, une formation sur les juridictions de commerce. Cette formation décisive est une étape de la réforme judiciaire visant l’amélioration du climat des affaires au Bénin.
Une chose est de créer les tribunaux de commerce, l’autre est de disposer de personnel qualifié pour les animer. L’enjeu de la création d’un environnement de justice favorable aux affaires entame ainsi sa seconde phase avec la formation des magistrats, juges consulaires et greffiers appelés à exercer dans les juridictions de commerce. L’Ecole régionale supérieure de la Magistrature (Ersuma) qui accueille une telle formation se félicite de l’initiative. Médard Désiré Backidi, directeur des études de l’institution, salue la détermination des autorités béninoises à s’engager dans la dynamique de spécialisation des acteurs de la justice sur le contentieux commercial afin d’améliorer la place du Bénin dans le classement Doing Business de la Banque mondiale. Pour lui, l’Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada), ayant compris très tôt l’intérêt de l’amélioration du climat des affaires dans les Etats membres, a lancé une série de réformes qui ont aidé plusieurs pays à soigner leur réglementation en matière de pratiques des affaires « L’Ersuma a toutes les compétences et les expertises nécessaires pour assurer la formation des animateurs de la justice du Bénin dans le domaine des juridictions du commerce », assure-t-il, jugeant qu’il était nécessaire que l’élan de spécialisation des juridictions soit accompagné de la spécialisation des acteurs.
La formation qui se déroule du 19 juin au 4 juillet est financée par la Banque mondiale à travers le Projet compétitivité et croissance intégrée (Pcci). Katrina Sharkey, représentante résidente de la Banque mondiale au Bénin indique qu’il s’agit d’une étape d’un processus enclenché depuis bientôt quatre ans. Ce processus a abouti en juillet 2016 à la réforme du cadre institutionnel de la justice commerciale au Bénin, à travers notamment l’adoption de la loi N°2016-15 du 28 juillet 2016, modifiant et complétant la loi 2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin. « Le processus en cours conduira à terme à la création de juridiction de commerce à même d’offrir aux opérateurs économiques un environnement propre à promouvoir les investissements privés tant nationaux qu’étrangers, à travers une plus grande confiance dans l’appareil judiciaire », souligne-t-elle. Katrina Sharkey soutient que la formation permettra d’aguerrir les futurs animateurs de ces précieux outils de règlement diligent et efficace des litiges commerciaux et d’attraction des investissements, à l’exercice de leurs fonctions respectives au sein de ces juridictions.
Impartialité et célérité !
Selon l’article 2 de la loi 2016-15, le tribunal de commerce de Cotonou et la Cour d’appel de Commerce de Porto-Novo doivent être installés dans les douze mois qui suivent son entrée en vigueur, et tous les autres tribunaux de commerce et cours d’appel de commerce ainsi que l’autorité nationale de suivi et d’évaluation dans les 24 mois. Le garde des sceaux, ministre de la Justice, Joseph Djogbénou, rassure que ce délai sera respecté. Il annonce l’ouverture du tribunal de commerce de Cotonou et la cour d’appel de commerce de Porto-Novo pour les tout prochains jours. « Nous voulons que le cadre institutionnel soit adapté aux besoins des affaires et que les animateurs soient à même de rendre la justice commerciale en toute impartialité. Ceux qui prennent part à cette formation constituent le vivier où il sera puisé les principaux animateurs des tribunaux et cours d’appel de commerce », insiste le ministre.
La réforme sur la création des tribunaux et cours d’appel de commerce découle des lenteurs observées dans le traitement et l’exécution des décisions liées aux conflits commerciaux qui pénalisent lourdement les entreprises. Selon les résultats du rapport « Doing Business 2017 », les délais, coûts et procédures d’exécution des contrats au Bénin sont supérieurs à la moyenne observée dans les pays africains. Cette faiblesse se justifie, entre autres, par l’insuffisance du nombre de magistrats affectés spécifiquement au contentieux commercial, le caractère pénalisant pour le créancier des pratiques en matière de consignation et la faible intégration des modes alternatifs de résolution des conflits dans le processus judiciaire. Avec l’ouverture prochaine des tribunaux et cours d’appel de commerce, le Bénin devra espérer un meilleur classement dans le Doing Business 2018?
SOURCE : LA NATION